Les « Observateurs » de Coluche sont de retour.

Si on les écoute (et il faut les écouter chaque semaine, sinon on ne peut pas suivre) telle semaine, le PSG n’a aucune chance car ce n’est pas une équipe au contraire de Lyon.

Si on les écoute au lendemain de PSG-Lyon, les jeunes Lyonnais sont trop tendres pour contrecarrer un PSG d’expérience.

A vrai dire, dans un championnat où trois équipes sont à égalité à la 18^ème journée, il est logique d’osciller d’un avis à un autre. Il est moins normal d’être catégorique à l’extrême d’une semaine à l’autre. Trois équipes ont prouvé qu’elles pouvaient être championnes au final, isn’t it ?

Parlons donc de l’OL. Et donnons-lui d’emblée son certif de bonne conduite. Car ce club, que l’on soit ou non sensible à sa nouvelle modestie, est assurément un grand club pour parvenir à surmonter ses difficultés économiques actuelles sur le terrain.

On peut toujours ergoter sur le fait que l’OL a gâché des jeunes (Balmont, Clerc, Ben Arfa, Rémy) durant des années avant de trouver le bon équilibre cette saison pour des raisons économiques. Cela me rappelle le FC Nantes des années 92/95. Même un club formateur comme le FC Nantes avait cru trouver la potion magique ailleurs et s’était éloigné de son ADN.

Jusqu’à être rattrapé par la crise financière, et se lancer dans l’exploitation maximale de son centre de formation. Point commun : c’est Jean-Claude Suaudeau, un homme du sérail, qui fut chargé de cette mission de reconstruction à Nantes après que le club eut tenté de voir ailleurs avec des entraîneurs extérieurs qui n’avaient pas vraiment apporté grand-chose. Euphémisme. Et c’est ainsi que la génération Karembeu-Pedros-Loko-Ouédec put gambader allègrement jusqu’au titre magique de 1995.

Même chose aujourd’hui à l’OL avec Rémi Garde en gardien de l’esprit lyonnais, dévolu à la mission de relance en s’appuyant sur les jeunes en attendant de vendre au mieux les anciens gros contrats des grandes années Aulas. Même si je ne crois pas un instant à la thèse selon laquelle Claude Puel aurait abimé l’OL durant des années. Ce serait oublier le fonctionnement même du club et le contrôle que le duo Aulas-Lacombe a toujours su garder sur la politique sportive. Si Puel (et cela mériterait débat) n’a pas été l’homme de la situation, la direction du club a toujours gardé la haute main sur l’équipe. De sorte que si le train a déraillé (très relativement si l’on considère que le pire a été une 4^ème place…sous Rémi Garde), il paraît très tordu, voire « prudhommial » de faire penser que ce soit uniquement de la faute de Puel.

En tout état de cause, si les jeunes ont été barrés pendant un temps à l’OL, on ne peut en attribuer la cause à Puel, si ouvert  sur le dossier jeunes à Lille puis à Nice aujourd’hui.

Mais, de fait, l’OL a passé la vitesse supérieure cette saison. Si le club rhodanien a déjà utilisé 28 joueurs cette saison, c’est qu’il a usé les joueurs jusqu’à leur départ (Lloris, Cissokho, Pied, Cris, Källström) et qu’il a convoqué aussi vite les jeunes pour prendre le relais (Fofana, Umtiti, Ghezzal, Grenier, Benzia).

Performances des jeunes lyonnais cette saison en L1

L’exemple le plus marquant est, bien sûr, celui de Grenier.

Gourcuff étant sur le retour à la trêve, le club a failli le laisser partir à Nice (et pas seulement en prêt). Finalement, la blessure de Gourcuff l’aura sauvé (et l’OL avec) et lui permet aujourd’hui d’être l’une des grandes satisfactions de la saison. Son exemple montre bien la fragilité d’une politique qui n’est pas dans les gènes du club. Souvenir : lorsque j’arpentais les réunions de dirigeants il y a une bonne dizaine d’années (je traînais un club de National dans ma bosse !), un nouveau règlement avait été voté. Il autorisait les clubs pros à ne plus avoir obligatoirement de centre de formation. Plutôt du bon sens car 43 ou 44 centres de formation sont-ils nécessaires en France ? Mais qui étaient les instigateurs de ce règlement permissif ? Les OM, PSG ou OL qui se disaient alors qu’avoir un centre de formation coûtait bien cher pour peu de choses. De fait, pourquoi ne pas développer des accords avec des clubs moins huppés (qui formeraient donc pour moins cher !) et récupérer ensuite les bons joueurs ?

Jean-Michel Aulas était évidemment séduit par cette idée. Aujourd’hui, il ne regrette sûrement pas les 5 à 6 millions d’Euros annuels que doit lui coûter le centre de formation de l’OL. Il lui permet de présenter une équipe fiable et conquérante à l’heure où l’OM pleure chaque blessé ou suspendu. C’est bien grâce à ce centre que l’OL peut envisager le reste de sa saison en déclarant chaque joueur vendable au mercato. L’OL peut-il survivre à Gomis ? Evidemment, en trouvant une solution moins chère sur le marché. Et en faisant sortir davantage Benzia et Ghezzal. L’OL peut-il survivre à Gourcuff ou Bastos ? Mais la première partie de saison l’a suffisamment démontrée. Ils ont si peu joué….

Sans eux, l’OL a même imprimé une marque de jeu dans ce championnat. Quand l’OM et le PSG ont montré des faiblesses au milieu de terrain tout au long de la phase aller, l’OL a basé sa régularité sur la fiabilité dans un secteur qui n’était plus son fort depuis trois ou quatre ans. A témoin, les chiffres accompagnant sa maîtrise du ballon.

Pourcentage de possesion du ballon des équipes de L1 cette saison

En terme de possession, l’OL fait référence.Il symbolise aussi un jeu vertical comme en témoigne son nombre de passes dans la moitié adverse.

Ce jeu concret et de qualité permet évidemment de mettre en avant des individualités collectives. Malbranque est un symbole fort de ce nouvel OL. Formé au club, il a lui aussi été gâché et vendu trop vite par l’OL. Avant d’aller écumer les terrains anglais de son talent et de sa régularité. Par manque de caractère, il n’a pas su franchir le cap des grands clubs anglais. Mais, pour l’OL d’aujourd’hui, c’est un symbole parfait : actif, vif, réactif. Et il figure parmi les meilleurs passeurs de notre Ligue 1.

Quantité de passes tentées dans la moitié adverse cette saison en L1

Pour moi, l’OL, c’est surtout Maxime Gonalons. Là où l’OM et le PSG peinent à avoir ce régulateur fidèle pour, de match en match, produire un niveau de jeu comparable, l’OL est parfaitement armé. L’international français me rappelait juste l’autre jour pourquoi il avait si vite progressé : « Espagne-France ». Mais c’est bien sûr. Un gros match de cette envergure face aux maîtres de la spatialisation et de la maîtrise du ballon au milieu de terrain a fait gagner des mois et des mois à Maxime Gonalons. Regardez-le jouer aujourd’hui. Droit, en équilibre, l’œil rivé sur le jeu, il sait tout analyser : où défendre, où relancer.

Joueurs ayant effectué le plus de passes décisives en L1

Il ne vous rappelle pas Busquets ? Sans les fioritures, peut-être. Mais c’est encore mieux.

Bref, tous les ingrédients pour donner au jeu lyonnais un équilibre dont rêve tout entraîneur, Rémi Garde compris. Résultat : suspension mise à part, Gonalons, le nouveau capitaine, joue toujours. Ses chiffres parlent.

S’il est vital à la récupération, sa relance est devenue une base indispensable à son équipe. Nul ne fait autant de passes en Ligue 1, nul n’en réussit autant.

Activité des milieux de terrain en L1.

Avec un tel joueur, vous pouvez toujours aller reprocher ensuite quelques intermittences à Grenier, quelques cafouillis à Malbranque (surtout en cette fin d’année éprouvante). Pas grave, Gonalons lave toujours plus propre derrière…

Bref, cet OL passera-t-il l’hiver ?

Je réponds « oui » quoiqu’il advienne. Voyez-vous un argument contraire ? Si Gomis et/ou Bastos partaient, me dites-vous ? Cela changerait indiscutablement le style de l’équipe offensivement. Mais vous imaginez le milieu lyonnais ne pas savoir jouer avec Lisandro Lopez s’il était replacé en pointe ?

Sans quelques atouts (mais Aulas ne brade jamais !), l’OL pourrait s’éloigner du titre. Mais la Ligue des Champions sera de retour sur Rhône et Saône, quoiqu’il advienne. Et ce serait assez juste, car l’OL est un grand club. Il ne l’a peut-être jamais aussi bien démontré que cette saison.

Car il faut ajouter à ce portrait l’attention mise par l’OL dans la Ligue Europa. Quel petit esprit a pu dire en France qu’elle ne rapportait rien et qu’il ne fallait pas la jouer sérieusement ? Il y en plein de tous petits esprits à l’excuse facile. Pourtant, les deux arguments sont aussi mauvais et faux l’un que l’autre. Elle rapporte et elle apporte. Sans oublier qu’on y fait aussi grandir des joueurs qui vous propulsent ensuite en Ligue 1. Et puis, vous connaissez un grand club dont l’objectif puisse être un seul jour la défaite ou l’élimination ? C’est évidemment ça, être un grand club…